La dette, c’est cadeau !

Tout ce qui touche à la mine, en particulier à la SMSP, est, de longue date, sujet à polémique. Après la mise en place du gouvernement Germain et les inévitables contreparties à l’égard notamment du Palika sur ces questions cruciales pour l’avenir de la Nouvelle-Calédonie, le sujet qui divise et qui fâche c’est désormais le fait de savoir qui a fait ou s’apprête à faire un « petit cadeau fiscal » de près de trois milliards à l’usine du Nord et à ses promoteurs.

Selon une technique et un timing bien rodés, quelques heures seulement après l’installation du  nouvel exécutif, Calédonie ensemble et ses affidés ont inondé les médias et la toile pour expliquer que si réduction de la dette il y a avait, il ne s’agirait en rien d’un cadeau et encore moins d’une contrepartie, mais simplement de l’aboutissement d’une démarche engagée et validée par l’équipe précédente.

Face à cette attaque en règle, qui n’est pas sans rappeler les accusations portées dans le cadre du dossier Prony/Pernod, le Front pour l’unité et l’Union pour une Calédonie dans la France hurlent à la manipulation et contestent vivement le fait qu’une ristourne ait déjà été accordée.

S’il est vrai que la Direction des services fiscaux de la Nouvelle-Calédonie a bien engagé des discussions avec la SMSP, c’est dans le cadre d’une procédure classique de conciliation à laquelle tous les contribuables peuvent avoir recours dès lors qu’ils estiment que le montant des impôts qui leur est réclamé ne correspond pas à ce qu’il devrait être.

Chacun, particulier ou entreprise, peut en effet présenter des arguments aux services fiscaux après avoir été destinataire d’un avis d’imposition.

Cette procédure, très fréquemment mise en œuvre, ne présage évidemment pas de la décision finale de l’administration, ni des éventuelles suites judiciaires que pourrait intenter l’entité imposable, encore moins des procédures de mise en recouvrement de la part de la Nouvelle-Calédonie.

écran de fumée

Si le gouvernement devait prendre la décision d’accorder, in fine, cette réduction de 2,8 milliards de francs, il s’agirait d’une oukase de plus de la part de l’exécutif, d’un deal passé entre le président actuel du gouvernement et le membre du gouvernement en charge de la fiscalité, c’est-à-dire dans les deux cas et pour ne pas le nommer, de Philippe Germain.

Il sera ensuite aisé d’expliquer que cette généreuse remise était inévitable en raison par exemple du statut juridique de la SMSP, du montage financier de l’usine, voire qu’il s’agit d’une conséquence « fortuite » des accords de Bercy.

Mais ce ne seront que des écrans de fumée pour tenter de dissimuler les motivations profondes de cette décision lourde de conséquences, une décision qui en appelle d’ailleurs sans doute bien d’autres tant le navire amiral que représente l’usine du Nord est au bord du naufrage.

Alliés objectifs et actifs de Paul Néaoutyine et André Dang, les élus et responsables de Calédonie ensemble disposent d’une fenêtre de quelques mois pour honorer leurs promesses, non pas auprès de leurs électeurs, mais en faveur de leurs partenaires indépendantistes.

Non qu’un travail constructif et respectueux des divergences politiques ne soit nécessaire, mais il doit être conduit dans le respect de chacun et dans la plus grande transparence à chaque fois que cela est possible.

Ce n’est manifestement pas la voie qui prévaut désormais sur le dossier nickel et fiscalité, comme sur bien d’autres secteurs (économie, budget, santé, etc.)

Mais ce qui est tout aussi inquiétant c’est le signal que donnerait une telle décision auprès des entreprises et des entrepreneurs.

Et ils sont déjà quelques-uns à envisager une fronde fiscale contre le gouvernement, une action qui rencontrerait évidemment aussi un fort écho auprès des contribuables calédoniens dont certains se plaignent déjà d’être imposables sans possibilité de devenir citoyen.