La bonne dose d’activité physique

En regardant les dernières recommandations de l’Organisation mondiale de la santé, de la France, des États-Unis ou d’autres études publiées récemment, l’important dans le sport, c’est la dose. Car si pas assez de sport nuit à notre santé, trop n’est pas bon non plus.

Un article publié la semaine dernière dans le Monde avance que « si se bouger est beaucoup mieux que pas du tout, au-delà d’une certaine limite, bouger peut tuer ou presque autant que l’inactivité ». De quoi faire réfléchir et se poser des questions.

Une étude menée à Taïwan auprès de 400 000 personnes a calculé que celles avec le plus faible niveau d’activité physique (15 minutes par jour) gagnent déjà trois années de vie par rapport aux individus totalement inactifs (The Lancet, 2011). Dans le même ordre, pour des chercheurs américains, 5 à 10 minutes de jogging par jour à moins de 10 km/h suffisent à réduire le risque de mortalité.

Mais à l’opposé chercheurs américains, canadiens et européens avancent que plus de 7 heures et demi d’activité physique par semaine sont un facteur de risque important de maladies cardiovasculaires. Les chercheurs de l’Université de l’Illinois, à Chicago, ont réalisé une étude Cardia (Coronary Artery Risk Development in Young Adults) auprès de 3 175 participants chez lesquels ils ont analysé le risque d’artériosclérose, symptôme du vieillissement des artères et signe avant-coureur de risque de développer une maladie cardiaque. « Les niveaux élevés d’exercice au fil du temps peuvent causer un stress sur les artères conduisant à un risque d’une artériosclérose plus élevé », précise Jamal Rana, coauteur de l’étude.

Les autres risques d’abus

Le sport s’il est pratiqué de manière intensive, à raison de plus d’une heure par jour, peut donc nuire gravement à notre santé en affaiblissant notre système cardiovasculaire (arrêt cardiaque, AVC, angines de poitrine), mais entraîne d’autres pathologies comme la bigorexie (voir encadré), des blessures, des fractures ou si ce n’est une grande fatigue.

Trop de sport réduit aussi la libido des hommes. Selon des chercheurs de l’Université de Caroline du Nord, au États-Unis « La raison à ce phénomène résiderait du côté des hormones : trop de sport nuit à la testostérone, impliquée dans le désir sexuel. » Autrement dit, le corps, épuisé par l’effort physique, se mettrait en mode veille pour recharger ses batteries.

La bonne dose ?

Le sport régulier est un facteur d’amélioration de la santé, de prévention des pathologies cardio- vasculaires et locomotrices, de prévention du cancer du sein, du colon, de la prostate et de beaucoup d’autres pathologies.

Comme le précise le Dr Martin Matsumara, du Cardiovascular Research Institute du Lehigh Valley Health Network, et grand spécialiste du sport et de la santé : « Le sport est bon pour la prévention et pour notre santé en général, à condition d’avoir fixé au préalable ses limites. Il faut absolument faire de l’activité physique adaptée à son âge et son train de vie. La pratique parfaite est basée sur un entretien de l’endurance, c’est-à-dire un sport qui implique des masses musculaires importantes comme la course à pied, le vélo, l’aviron, etc., un entretien de la souplesse, du stretching, par exemple, et un entretien de la force, comme du gainage, de la musculature para-vertébrale, etc. » Dans l’idéal, le chercheur et médecin précise que « chaque entretien se fera deux à trois fois par semaine sur une durée de 30 à 45 minutes, soit une durée qui respecte l’appareil locomoteur. Mais une fois de plus, il faut au préalable vérifier s’il n’y a pas de contre- indications, il faut vérifier si la personne ne présente aucun risque d’altération de son état de santé à travers ses activités. »

Les recommandations à suivre

Tant les études et les points de vue sont nombreux quant à la dose d’activité physique nécessaire ou qu’il ne faut pas dépasser, l’OMS (Organisation mondiale de la santé) a mis au point les Recommandations mondiales en matière d’activité physique pour la santé dans le but premier de fournir aux décideurs politiques nationaux et régionaux des indications sur la relation dose/effet entre la fréquence, la durée, l’intensité, le type et la quantité totale d’activité physique nécessaire pour prévenir les maladies non transmissibles. Aujourd’hui, ces recommandations servent de référence au monde médical.

Ainsi, pour les enfants de 5 à 17 ans, l’OMS préconise d’accumuler au moins 60 minutes par jour d’activité physique d’intensité modérée à soutenue, allant des simples déplacements au jeu, en passant par la course à pied ou la gymnastique. Ces recommandations passent pour les adultes âgés de 18 à 64 ans à 300 minutes d’activité d’endurance modérée par semaine (42 minutes/jour) ou 150 minutes d’activité intense (21 minutes/jour). La marche, le vélo et la natation sont conseillés. Pour les plus de 65 ans, les temps des 18-64 ans sont divisés par deux.

Et la Calédonie ?

Selon le dernier Baromètre santé de 2016, plus de 75 % des Calédoniens âgés entre 18 et 60 ans déclarent consacrer plus de 30 minutes par jour à une activité physique modérée, ce qui est supérieur aux recommandations de l’OMS. Près d’un quart de la population pratique une activité physique intense plus de 3 heures par semaine et près d’un tiers moins de 3 heures par semaine. L’activité physique intense diminue avec l’âge et les femmes y consacrent moins de temps que les hommes. En somme, en Nouvelle-Calédonie, 8 adultes sur 10 déclarent consacrer un temps à une activité physique modérée ou intense en moyenne chaque semaine. La Calédonie est donc un bon élève en matière d’activité physique, selon le Baromètre santé. Ce qui ne nous empêche pas d’avoir 54 % de la population obèse ou en surpoids.


La bigorexie

C’est un terme qui fait générale- ment référence à la dépendance au sport. L’addiction risque de s’installer quand l’activité phy- sique devient quotidienne, voire pratiquée plusieurs fois par jour, qu’elle prend le pas sur le reste de la vie, qu’elle sert à combler un manque, un vide (même incon- sciemment), qu’elle génère stress quand elle est arrêtée ou limitée. Les personnes qui en souffrent prennent des risques pour assou- vir leur addiction et n’écoutent pas leur corps. Il y a des effets indési- rables sur le squelette, sur le cœur, l’alimentation avec des troubles du comportement alimentaire allant jusqu’à l’anorexie mentale.

C.Sch