Politique agricole : l’autosuffisance de Calédonie ensemble

Chaque année, autour du 15 août le monde agricole donne rendez-vous aux Calédoniens à la Foire de Bourail pour montrer son savoir-faire mais aussi, le cas échéant, pour faire connaître haut et fort ce qui ne va pas. Le climat s’annonce pourtant apaisé cette année puisque la province Sud et le gouvernement font feu de tout bois pour multiplier les annonces en faveur des agriculteurs, quitte à oublier qu’ils sont arrivés aux responsabilités dans un secteur déjà très largement choyé par leurs prédécesseurs.

 « Habemus papam » ou pour être plus juste « Nous avons une Papp », une politique publique agricole provinciale. Samedi dernier à La Foa, Philipe Gomès, Philippe Michel, Nicolas Metzdorf ou encore Philippe Germain avaient mis les petits plats dans les grands pour présenter au monde agricole calédonien le plan d’action de la province et du pays en faveur d’un secteur considéré comme sinistré. Alléchés sans doute par les aides et les subventions promises, souvent à juste titre, et de crainte de ne pas figurer sur les tableaux d’émargement, éleveurs, céréaliers, maraîchers ont évidemment répondu présent à la convocation.

Mais à huit jours de la Foire de Bourail, l’organisation de cette journée n’avait rien d’innocent. Elle aura été l’occasion de présenter la restitution des Assises 2015 de l’agriculture, de réaffirmer que l’objectif numéro un restait bien celui d’atteindre 30 % d’autosuffisance alimentaire à l’horizon 2025 et de se féliciter de l’adoption de quelques textes au Congrès ou à la province, à commencer par la loi du pays sur les baux ruraux dont la mise en œuvre concrète rencontre pourtant plus d’écueils que de succès. Mais au fond, si nombre de constats posés sonnent juste, ce n’est ni une nouveauté, ni le fruit du hasard.

Depuis des années, les différents responsables politiques calédoniens en charge des questions agricoles se sont engagés en faveur de ce que certains croient encore être le monde de la brousse. La création des filières, la professionnalisation des acteurs de terrain, privés et publics, les politiques de compensation et d’indemnisation, l’encadrement des usages des produits phytosanitaires ont permis de sauver un secteur d’activité qui, dans de nombreuses communes de l’intérieur, n’est plus, et de loin, le plus important, ni en termes d’emploi, ni en termes de chiffre d’affaires.

Comme ailleurs, cette professionnalisation qui s’est souvent accompagnée d’un phénomène de mécanisation, essentiellement sur la côte ouest, a eu pour conséquence un effondrement de la population agricole et, faute de relève, un vieillissement général des exploitants. S’y est ajouté la faiblesse des salaires avec un référentiel de base, le Smag, salaire minimum agricole, inférieur de 20 % au SMG, salaire minimum garanti. Que dire encore des retraites ou de la condition des conjoints qui, comme dans l’artisanat, n’est pas reconnue.

Au-delà de l’héritage culturel et de la transmission des savoir-faire, devenir agriculteur reste aujourd’hui un engagement dans une profession, certes riche, empreinte d’une véritable liberté, forte du souvenir d’une certaine « Caledonian way of life », mais aussi aventureuse et risquée. Une profession où l’humilité a tout à nous dire et ceux qui en ont la responsabilité politique auraient tout intérêt à s’en souvenir.

C.V.

© p.Sud

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

.