Gouvernement : une équation évidente pour un président qui ne l’est pas !

Le renouvellement du gouvernement est annoncé début septembre et Philippe Germain envisage toujours de conduire la liste de la plateforme et de se succéder à lui-même. Mais, si le rapport de force entre indépendantistes et non-indépendantistes ne fait aucun doute, plus difficile sera de s’entendre pour former une majorité loyaliste. Une nouvelle crise institutionnelle se profilerait- t-elle ?

Une voix nécessaire. – L’exécutif calédonien est, on le sait, une émanation à la proportionnelle du Congrès. Le calcul est donc fort simple pour un gouvernement à 11 membres : cinq indépendantistes (trois pour l’Union calédonienne, deux pour l’Uni- Palika) ; six non-indépendantistes (cinq pour les plateformistes, s’ils font liste commune, un pour le groupe de Sonia Backes). En clair, si la plateforme (Calédonie ensemble, Rassemblement, Yanno) veut conserver la présidence du gouvernement, ils devront compter sur la voix des Républicains calédoniens !

Inflexion de la politique économique.– Par avance, on peut exclure que leur élu votera pour un président indépendantiste : la récente élection de Thierry Santa au perchoir du Congrès (avec toutes les voix loyalistes, dès le second tour de scrutin) a définitivement fait taire ce type de rumeurs… On peut aussi gager que Les Républicains calédoniens demanderont « une inflexion de la politique économique », souvent jugée « socialisante, notamment avec les ponctions fiscales répétées », ainsi qu’une refonte de la loi antitrust, « inadaptée, selon eux, au petit marché qu’est la Calédonie ».

Vives tensions. – La donne politique étant connue de tous, on pourrait s’imaginer que des négociations entre formations loyalistes aient lieu en coulisses. Mais pas du tout. Le climat s’est encore rafraîchi la semaine dernière, lorsqu’en assemblée de province Sud, les plateformistes ont exclu les élus du groupe de Sonia Backes des 22 établissements publics ou sociétés où ils étaient représentés. Et que cette « purge » a également visé les trois collaborateurs du groupe, dont le contrat n’a pas été prorogé… À 48 heures de la démission officielle de Philippe Dunoyer, qui marquera les opérations de renouvellement du gouvernement, le moins que l’on puisse dire est que la tension est vive. Exacerbée, même.

Stabilité au Rassemblement. – À quoi devrait ressembler le nouvel exécutif, celui qui, en principe, sera aux manettes lors du référendum de 2018 ? Philippe Germain espère bien sûr conserver son fauteuil (lire ci-dessous). Côté Rassemblement, Cynthia Ligeard devrait être reconduite, tout comme Bernard Deladrière, avec un portefeuille peut- être élargi au budget. À Calédonie ensemble, Hélène Iekawé, bien engagée dans le projet éducatif de la Calédonie devrait, elle aussi, poursuivre sa mission. Reste à trouver un successeur à Philippe Dunoyer, porte-parole du gouvernement. Enfin, le membre du gouvernement des Républicains calédoniens devrait venir de la société civile, afin de ne pas affaiblir leur groupe au Congrès…

Déwé Gorodey raccrocherait.– Côté Uni-Palika, Valentine Eurisouké devrait rempiler. Alors que Déwé Gorodey raccrocherait pudiquement pour des raisons de « convenances personnelles » : cette grande dame de la culture kanak aura participé à tous les gouvernements, depuis celui de Jean Lèques en 1999. Et même assuré plusieurs fois la vice-présidence de l’exécutif. Les noms d’Ithupane Tieoue ou de Louis Mapou circulent pour rejoindre le gouvernement.

Anthony Lecren divise l’UC. – Enfin, la situation est encore bien confuse à l’Union calédonienne où le cas d’Anthony Lecren divise : l’UC Nord emmenée par Daniel Goa voudrait se débarrasser de cette personnalité aux multiples frasques. L’UC du Sud retient surtout ses « réussites » au gouvernement comme les Zodep* ou la place de choix que s’est taillée la Calédonie dans le Pacifique dans la protection des océans et la lutte contre le réchauffement climatique. Une chose est sûre : la liste de l’UC pour le gouvernement sera déposée par son chef de groupe au Congrès : Roch Wamytan, famille avec Anthony Lecren. Quelle que soit sa décision, il y aura des séquelles dans cette famille… politique.

*Zones de développement prioritaire


Le long silence de Philippe Michel

À la question d’Elizabeth Nouar, la semaine dernière sur RRB, « Et c’est Philippe Germain qui se succèdera
à lui-même ? », Philippe Michel a marqué un long, très long, moment de silence, avant de botter en touche : « Euh, ce n’est pas une question d’homme, mais il est clair que le premier parti devrait assumer la présidence de l’exécutif calédonien. » L’embarras à répondre du président de la province Sud traduit surtout celui de Calédonie ensemble de n’avoir pas mis en selle un successeur potentiel à l’ancien patron de Biscochoc, qui agacerait au plus haut point Philippe Gomès. Mais qui ? Calédonie ensemble semble avoir grillé toutes ses cartes maîtresses à des postes clefs : « des cadres essentiels au dispositif », selon la formule qu’affectionne le patron de Calédonie ensemble. Ce qui pourrait faire les affaires de Philippe Germain, rue des Artifices. Mais ses détracteurs ne désarment pas : « Un fusible n’est pas fait pour durer aussi longtemps ! », lâchent-ils.

M.Sp.