Existe-t-il un régime anticancer ?

Lors de sa conférence, lundi, à l’Université de la Nouvelle-Calédonie, David Khayat, cancérologue réputé mondialement et professeur à l’université Pierre-et-Marie- Curie à Paris, a présenté le régime qui lutte de la façon la plus e cace pour essayer de réduire le risque de cancer. Détails…

Après plusieurs publications comme Les chemins de l’espoir, Le guide pratique du cancer et De larmes et de sang, le Pr David Khayat s’est penché depuis de longues années sur les régimes anticancer avec, notamment, Les recettes gourmandes du vrai régime anticancer. C’est sur ce thème qu’il parcourt le monde et partage les résultats de trente ans de recherche. L’ancien chef du service de cancérologie à l’hôpital de la Pitié- Salpêtrière de Paris, fondateur et ancien président de l’Institut national du cancer, tient avant tout à préciser qu’il n’existe pas un régime universel. « Ce qui est nécessairement bon pour un homme ne l’est pas pour une femme, pareil pour les jeunes ou les personnes âgées, que l’on soit roux ou brun, blond, grand, petit, parce qu’il n’y pas d’organisme type. Nous ne digérons pas tous de la même manière, car nous ne sommes pas tous identiques sur le plan génétique. » À cette première donnée s’ajoute celle de la complexité de l’alimentation humaine : « Elle est différente selon le lieu, le mode de consommation, l’enchaînement de prise des aliments, leur combinaison dans l’estomac et j’en passe. »

Donc, il n’y a pas de régime universel pour prévenir le cancer, mais des règles d’or en termes d’alimentation qui sont simples et font appel au bon sens. Mais avant tout il faut, selon David Khayat, rajouter une règle qui est celle de ne pas fumer. « Il serait illusoire de travailler sur son alimentation pour réduire le risque de cancer si, à côté de cela, on continue de fumer. »

Les règles à privilégier

Pour le cancérologue, la première règle a respecter est de diversifier son alimentation en fonction des saisons. « Nous avons trop longtemps souffert de la “westernisation” de notre alimentation, qui nous fait oublier des recettes ancestrales de terroir qu’il faut se réapproprier », affirme-t-il. Deuxièmement, il faut diversifier ses modes de cuisson. « Même si l’on sait qu’une cuisson au barbecue ou au wok est potentiellement cancérigène, on peut le faire occasionnellement. Mais n’en mangeons pas tous les jours, privilégions le braisage ou la cuisine vapeur. » Enfin, « veillez à maintenir une activité physique. C’est très important, car l’on sait que l’embonpoint favorise bien des cancers. »

Les produits conseillés

Il faut choisir, quand on peut le faire, les produits artisanaux, les recettes régionales. « Quand une recette a traversé l’histoire, quand des gens en ont mangé pendant des générations et que grâce à cela, ils ont pu se développer en tant que société, cela veut dire que ces plats ne sont pas mauvais, d’autant que notre organisme a pu s’habituer génétiquement. »

Le Pr David Khayat

Quand on demande au professeur quels sont les aliments à privilégier, il répond sans hésiter : « Celui qui m’a le plus étonné, c’est la grenade. C’est le jus qui est important en raison de sa quantité d’antioxydants, surtout dans les jus industriels ou la peau est mélangée au jus. Sa consommation diminue de façon très significative le risque de cancer de la prostate et le risque de rechute. Le jus de grenade est béné que également pour le cancer du sein chez la femme après la ménopause et encore bien d’autres cancers. Il faut en boire toute l’année. »

Dans son top 10 des aliments qui peuvent réduire le cancer, David Khayat met également en avant le curcuma, le thé vert, le vin avec modération, le sélénium (un oligo-élément que l’on trouve principalement dans les noix, les huîtres et les champignons), la tomate, l’ail et l’oignon et la quercétine (nutriment que l’on trouve dans les câpres, la livèche, le piment et le cacao).

Consommer de la viande rouge

D’après lui, et contrairement à ce que conseillait le Dr David Servan-Schreiber, pionnier de l’alimentation anticancer, la viande n’est pas cancérigène. La plupart des études scientifiques donnant la consommation excessive de viande comme facteur de risque sont américaines et les viandes françaises ou même calédoniennes sont moins caloriques et d’origine contrôlée. Mais il faut penser à la consommer en la vidant de son sang et la faire peu cuire. Pour la volaille, il faut éviter de manger la peau.

Poisson ou pas ?

Le poisson est une autre divergence majeure entre les deux médecins. « Le Dr Schreiber recommandait la consommation de poissons gras, riches en omégas 3, qui auraient des e ffets protecteurs contre le cancer. À l’inverse, je pense que les effets anticancer des omégas 3 ne sont pas une certitude scientifique suffisamment solide pour motiver la consommation de poisson gras tels que le saumon ou le thon rouge… » D’autant que la pollution de ces poissons est malheureusement établie. « PCB, pesticides, mercure et autres métaux lourds sont bien présents dans les poissons gras et sont de redoutables cancérigènes. » Le Pr Khayat conseille donc de consommer les petits poissons et les poissons non gras, comme les maquereaux, les anchois, les sardines, le bar, la sole ou la dorade.

Les légumes et les plantes anticancer

Pour le cancérologue comme d’autres professeurs, il faut privilégier les légumes crucifères tels que le brocoli ou les choux de Bruxelles. Ces derniers sont riches en isothiocyanates et permettraient de réduire le risque de cancer de la vessie. Les indoles, une autre substance naturellement présente dans cet aliment, contribueraient également à évacuer les toxines cancérigènes de l’organisme et seraient ainsi utiles pour lutter contre les cancers du côlon, de la prostate, du sein et de l’utérus. Les choux de Bruxelles, chargés en vitamine C, minéraux et bres, protègent en outre des maladies cardiovasculaires et des complications digestives. Cuits à la vapeur, ils conservent la plus grande partie de leurs apports nutritifs.

Il faut également manger des légumes riches en carotène et consommer des plantes telles que le thym, le romarin ou le thé vert, qui prodiguent des bienfaits similaires. Le thé vert pourrait empêcher le développement de cancers, dont ceux de la vessie et de la prostate. Les catéchines, des antioxydants présents en très grande quantité dans le thé vert – et moins dans le thé noir – seraient des molécules anticancéreuses. Cette boisson agit également comme un purificateur de l’organisme en activant les mécanismes du foie qui élimine les toxines cancérigènes. Pour bénéficier des vertus du thé, il faut boire l’équivalent de trois tasses de thé quotidiennement.

Et quid du bio ?

Pour le cancérologue, c’est clair : « Bien sûr que le bio, c’est meilleur que pas bien, mais pour autant, aucune étude n’a démontré que le bio était meilleur. » Ce qu’il faut éviter absolument ce sont, de toute manière, les pesticides présents dans les aliments que nous mangeons. « Les pesticides ne sont pas hydrosolubles, ils ne partent au lavage à l’eau, ils sont liposolubles, ils partent à l’eau savonneuse. Donc laver vos aliments, vos fruits et légumes à l’eau un peu savonneuse et les rincer. Et surtout garder si possible la peau ou l’écorce, car c’est là qu’il y a le plus d’antioxydants ! »

C.S