Enseignement et pouvoirs publics : les questions qui se posent pour demain

Yves Dassonville et François Garde étaient en Nouvelle-Calédonie dans le cadre de la mission sur l’avenir institutionnel de la Nouvelle-Calédonie. Au programme de ce déplacement, une série d’entretiens sur l’éducation et la recherche ainsi que l’organisation des pouvoirs publics. Objectif : se projeter dans l’après-Accord de Nouméa, apporter des éléments de réponse, noter les réflexions et faire un point à Paris. En attendant, chacun a bien voulu nous éclairer en quelques mots sur son sujet. 

 

DNC : Quels sont les points qui sont évoqués dans le cadre des discussions sur l’organisation des pouvoirs publics ? 

François Garde : Nous évoquons l’existence et les compétences des communes, des provinces, de la Nouvelle-Calédonie, leur mode de fonctionnement, leur financement. Et nous voyons dans la situation actuelle ce qui marche bien. Je pense, par exemple, que les communes et les provinces font l’objet d’un assez large consensus même si la question peut être un peu plus compliquée en termes de financement. Et puis, s’agissant de la Nouvelle-Calédonie, nous imaginons quelle pourrait être son organisation à l’avenir : le Congrès doit-il être toujours la réunion des assemblées de province ? Est-ce que le gouvernement collégial est un modèle qui est à bout de souffle comme le disent certains ? Est-ce qu’il faut le maintenir, passer à un gouvernement majoritaire, garder le haut-commissaire au sein du gouvernement ? Le système des lois du pays doit-il être prolongé ? Il y a un comité économique, social et environnemental, un Sénat coutumier… Quelle est leur place ? Cela doit-il être revu ? Toutes ces questions sont sur la table et nous verrons bien comment les différents mouvements politiques et les signataires se positionneront. Si tout se passe bien, on en restera là, mais apparemment ce n’est pas le cas. Nous verrons les points de consensus et les points de divergence.

DNC : Votre programme inclut des réunions publiques, sentez-vous un réel intérêt de la population pour ces questions auxquelles il faudra, c’est vrai, répondre assez vite ?

 

François Garde : Oui, il y a un intérêt évident de la population pour savoir tout simplement quel sera son avenir institutionnel. On le voit  dans nos réseaux mais aussi via les syndicats, le patronat, la société civile. La phase de réflexion est partagée.

DNC : Quelles pistes sont évoquées en matière d’enseignement et de recherche ? 

Yves Dassonville : S’agissant de l’enseignement, vous savez que le primaire a été transféré à la Nouvelle-Calédonie en 2000 et le secondaire en 2012. La question que l’on peut se poser, c’est de savoir si on peut aller plus loin dans ce transfert, si la Nouvelle-Calédonie peut gérer plus directement la carrière, l’affectation des professeurs, etc.

S’agissant de l’enseignement supérieur et de la recherche, le sujet est de savoir si cette compétence peut être prise par la Nouvelle-Calédonie. Elle est mentionnée dans l’article 27 de la loi organique sans que l’on parle d’ailleurs de la recherche. Ce qui crée des difficultés parce que, par définition, l’université fait à la fois de l’enseignement et de la recherche. Mais nous nous situons au-delà de l’article 27, donc la difficulté juridique serait moindre. N’empêche que transférer au territoire la responsabilité de l’université n’est pas quelque chose de facile à faire.

Nous attirons l’attention sur le fait que la Nouvelle-Calédonie est un petit pays, pour qui cette prise de responsabilité constituerait un défi.

Nous évoquons par ailleurs la question des diplômes. Il y a déjà ici des diplômes calédoniens, mais il y en a d’autres comme les maîtrises en droit, en sciences économiques qui doivent être – dans l’intérêt de tous – valables dans le plus grand nombre de pays. En France, mais aussi au niveau international.

On sait qu’il peut y avoir des systèmes de
« reconnaissance » mais il faut faire très attention parce qu’ils seraient reconnus en France, certes, mais le seraient-ils en Australie, au Canada, à Fidji, aux états-Unis ? La reconnaissance n’a pas la même valeur, c’est bilatéral. C’est la même chose pour le baccalauréat.

DNC : Avez-vous l’impression que la population s’empare de ces  sujets sur l’avenir, qu’on lui donne cette possibilité ? 

Yves Dassonville : Non, je considère que la société calédonienne ne s’empare pas assez de ces sujets. Mais c’est notre faute à tous. On va essayer de corriger cela. Il faut que la société calédonienne s’empare de ces questions, qu’on lui donne les possibilités de se déterminer.