Éducation : Les priorités de 2018

Lors de leur traditionnelle conférence de presse de rentrée, les directions de l’enseignement et le vice-rectorat ont présenté les dossiers prioritaires de cette année dont la réforme du premier degré, le parcours civique et le plan de lutte contre le décrochage et les incivilités.

À entendre Hélène Iekawé, membre du gouvernement en charge de l’enseignement et Jean-Charles Ringard-Flament, vice-recteur, la rentrée 2018 a été réussie de manière générale. Elle s’est effectuée sans mouvement social, « sans l’UGPE », la plupart des élèves de 3e ont pu être affectés selon leurs premiers vœux et l’harmonie a prévalu dans la plupart des établissements. Même si les exceptions ont fait davantage de bruit comme l’agression regrettable à Pétro-Attiti ou encore les dégradations d’établissements. Quelques semaines plus tard, il s’agit désormais d’aller de l’avant : le travail ne manque pas : 2018, on le sait, correspond à la deuxième année du fameux projet éducatif avalisé par le Congrès, qui donne forme peu à peu à l’école calédonienne.

Focus sur le 1er degré

2018 va correspondre, pour le second degré, à la mise en œuvre effective de la réforme du collège préparée l’année dernière. Cette réforme, maintes fois commentée et expliquée, comprend, pour faire court, une articulation renforcée école/collège, de nouveaux programmes, un nouveau socle commun, un nouveau brevet, une nouvelle organisation pédagogique. Cette année, le focus portera sur la préparation de la réforme du 1er degré, qui doit entrer en vigueur en 2019 avec, justement, cette mise en cohérence entre l’école et le collège.

Il s’agira d’établir, là aussi, le socle commun, de revoir le contenu des programmes avec notamment les éléments fondamentaux de la culture kanak. Deux nouveaux cycles vont voir le jour : CP-CE1-CE2 et CM1-CM2-6e.  Sont prévus également de nouveaux volumes horaires avec une « meilleure répartition du temps des enfants » entre l’enseignement des disciplines et l’enseignement complémentaire, comme la méthodologie ou le fait d’« apprendre à apprendre » qui a pu faire défaut aux enfants arrivant au collège. Il y aura du nouveau aussi pour les enseignants : six mercredis pédagogiques seront réservés à la formation continue. Les conseils pédagogiques et autres concertations seront répartis autrement et il n’y aura donc plus dix mercredis occupés pour cela.

De meilleurs citoyens

Pour former les adultes de demain, des êtres épanouis, respectueux et conscients des enjeux de leurs temps, l’accent est porté, toujours dans le cadre de la mise en œuvre du projet éducatif, sur le parcours civique obligatoire et personnalisé tout au long de la scolarité. Il a été intégré au collège avec cinq champs éducatifs : l’éducation morale et civique, la défense et la sécurité, la santé, le développement durable, l’éducation aux médias et à l’information. Les collégiens, s’ils le souhaitent, peuvent désormais choisir de passer leur matière au brevet. Ce programme permettra cette année, par exemple, d’évoquer le référendum ou encore la sécurité routière. Le dispositif a été expérimenté dans de nombreuses écoles et doit aussi être développé dans le primaire, à partir de la grande section, avec à la clé une attestation en CM2. Mais des textes supplémentaires doivent permettre sa mise en œuvre. Hélène Iekawé va par ailleurs reproposer le volet 2 de ce parcours civique, pour les 16-18 ans, refusé par deux fois au Congrès. Le volet 3 restant concernant le service civique pour les plus âgés.

À noter que cette année sera marquée par la première Fête de la jeunesse calédonienne le 1er septembre au centre culturel Tjibaou. Les élèves du CM1 à la terminale vont travailler sur leurs projets dans le cadre de leur parcours citoyen entre avril et août. « L’occasion d’impliquer les jeunes et de donner une image positive de cette jeunesse », souligne le vice-recteur.

Lutte contre la violence et le décrochage

Les autorités continuent, par ailleurs, de déployer le plan de lutte contre les incivilités, la violence et le décrochage scolaire. L’exemple de l’élève de Pétro-Attiti, qui avait fait l’objet de signalements depuis le primaire et dont la situation restait inconnue des différents établissements qu’il fréquentait, ne peut plus se reproduire a laissé entendre Hélène Iekawé : le passage d’information doit se faire pour permettre au vice-rectorat d’organiser l’accueil de ces enfants « qui ont aussi le droit à la scolarité ». « À l’omerta doit se substituer la discrétion professionnelle », résume le vice- recteur.

Face à ces élèves en difficulté, l’idée générale est de « construire l’étagement des réponses ». Celui-ci pourrait se matérialiser d’abord par un suivi scolaire plus assidu dans les établissements, puis pour d’autres, par un suivi avec éducateur spécialisé et enseignant spécialisés de la PJEJ (Protection judiciaire de l’enfance et de la jeunesse) au sein de l’école ou entre l’école et un établissement particulier. C’est ainsi qu’un partenariat a été signé récemment entre le vice-rectorat et la DPJEJ avec la mise à disposition d’un enseignant spécialisé à temps plein pour chapeauter l’aide apportée à ces jeunes de plus de 14 ans en décrochage scolaire et axer davantage les travaux sur les bases de la scolarité. Selon les cas, des conventions spécifiques individualisées seront signées entre l’établissement, la DPJEJ, le jeune et sa famille avec un programme personnalisé et de suivi d’enseignement, de stages, d’activités et de transport. Dans les cas les moins graves, une prise en charge sous forme de simple soutien scolaire, à titre préventif, sera établie.

Un établissement spécialisé à La Foa pour les élèves les plus « durs »

Pour les élèves aux profils les plus compliqués pour lesquels l’école classique ne peut plus grand-chose, la Nouvelle-Calédonie va se doter d’un Épea, établissement pays d’enseignement adapté, équivalent d’un Érea (établissement régional) en Métropole. Le 12 mars, le Congrès a donné son accord de principe pour la création d’un tel établissement, un internat éducatif, qui concernerait surtout les élèves de la 4e jusqu’à la formation professionnelle (avec trois CAP de spécialités) pour une durée de trois ou quatre ans. Ils seraient affectés par commission spécialisée. Le projet est plus qu’avancé : la localisation à La Foa « point médian du territoire », l’estimation de l’aménagement des locaux, les postes à pourvoir (24 au total entre les éducateurs spécialisés, les professeurs et personnel administratif) sont définis. L’ouverture est prévue pour février 2020. L’Épea devrait accueillir une centaine d’élèves avec une prise en charge de la Nouvelle- Calédonie et de l’État. « Il y a un déficit local et aucune raison qu’il n’y ait pas ce type d’établissement sur le territoire », conclut Jean- Charles Ringard-Flament.


Diminution des effectifs

Globalement, le nombre d’élèves calédoniens est en diminution par rapport à 2017, d’environ 150 élèves (68 037). Seules exceptions à cette tendance, l’augmentation du nombre de jeunes dans le second degré public (+ 208), l’enseignement agricole public (+ 13) et l’augmentation des filières post-bac en lycée (BTS, classes préparatoire aux grandes écoles ou CPGE, diplôme comptable).

Le premier degré est le plus touché par la baisse du nombre d’enfants : – 634 depuis 2012. Mais trois zones tirent leur épingle du jeu avec une forte augmentation démographique : Dumbéa-sur-Mer (+ 1065), Païta (+ 300) et la zone VKP (+ 360). Deux lycées montent également en charge : Pouembout (+ 197 élèves) et le Mont-Dore (+ 282). Ils seront à plein régime à la rentrée 2019.

Mais globalement, la tendance à la baisse devrait se confirmer sur les dix prochaines années, selon les projections effectuées. Il y aura 360 élèves en moins au total l’année prochaine, par exemple.


Le public toujours en progression

Actuellement, l’enseignement public représente 75 % des effectifs, contre 25 % pour le privé. En 2000-2001, l’enseignement privé représentait 30 % des effectifs. Plus loin, en 1970, les chiffres étaient inversés, 75 % pour le privé, 25 % pour le public.


Montée en compétence

51 % des élèves sont dans le 1er degré, 45 % dans le second degré et 4 % en post-bac. Les effectifs du post-bac en lycée ont doublé depuis 2012 « en raison de l’augmentation de l’offre de formation ». Il y a, en Nouvelle-Calédonie, deux fois plus d’élèves en BTS qu’en Métropole, 36 % ici, contre 18 % là-bas.

« C’est une vraie réussite, un vrai choix politique qui se concrétise, un impact concret du projet éducatif », a souligné le vice-recteur qui estime que sans ces cursus « certains enfants n’auraient jamais fait d’études supérieures ». Les filières BTS et les classes préparatoires de Lapérouse, Garnier et Grand Nouméa permettent d’arriver à un niveau licence ou d’accéder aux grandes écoles. 30 % des jeunes sont issus de milieux défavorisés et le taux de réussite est en moyenne de 75 % depuis cinq ans.

À noter par ailleurs l’inversion très concrète des tendances d’orientation après la 3e entre 2015 et 2017. Si les élèves étaient plus nombreux à se diriger dans des voies professionnelles en 2015 (près de 52 %), ils sont aujourd’hui plus nombreux à choisir les filières générales et technologiques (près de 53 %). L’objectif est d’atteindre 55 % d’orientation dans ces dernières filières en 2020, 45 % en professionnel. « Sans dévaloriser l’honneur de la voie professionnelle qui permet à de nombreux jeunes d’obtenir des diplômes, c’est une autre traduction de la montée en compétence du pays », analyse Jean-Charles Ringard-Flament.


L’enseignement agricole plaît toujours

445 enfants suivent cette année un cursus agricole dans le public ou le privé. 300 élèves sont au lycée Michel-Rocard, 96 à Do-Néva, 39 au lycée du Mont-Dore (CAP agricole). Enfin, des maisons familiales rurales accueillent des enfants de 4e et 3e. Dans une situation fragile ces établissements au statut associatif feront l’objet d’une refonte cette année pour « repartir en puissance ».


Les instit gardent leur cursus

Une épine du pied est finalement enlevée en ce qui concerne les formations des instituteurs du premier degré : l’État a confirmé que le diplôme grade licence « enseigner dans le premier degré » à l’IFM-NC et à l’Énep resterait d’actualité pour la formation des instituteurs. Ce cursus est ouvert aux bacheliers et offre une alternative à la formation des professeurs de l’Espé, recrutés, eux, par concours au niveau licence.

Il n’y aura désormais plus besoin de ces dérogations qui donnaient chaque année des frayeurs aux personnes concernées par ce parcours supprimé en Métropole où on ne forme plus que des professeurs niveau master. La Nouvelle-Calédonie réfléchit néanmoins à reconfigurer cet enseignement réparti entre l’Énep (privé), l’Éspé et l’IFM-NC (public) avec d’abord des cours conjoints et, à terme, un seul institut de formation.


Calendrier des examens

Comme prévu dans le projet éducatif de la Nouvelle-Calédonie, les autorités sont parvenues à « récupérer » le troisième trimestre, avec 15 jours à trois semaines de cours supplémentaires sur l’année, ce qui équivaudrait à 21 semaines sur l’ensemble de la scolarité de nos enfants grâce notamment à la correction locale des examens. « Nous avons poussé le calendrier au bout du bout », commente le vice-recteur. Résultat : les conseils de classe sont repoussés à fin novembre et la fin de l’année scolaire est arrêtée au 14 décembre.

Dans le détail voici les dates des examens et de l’annonce des résultats :

  • Brevet : 10 et 11 décembre – résultats le 19 décembre.
  • CAP : 19 et 20 novembre – résultats le 14 décembre.
  • Bac pro: 19 et 20 novembre – résultats les 12 et 18 décembre.
  • Bac général : du 26 au 30 novembre – résultats les 13 et 20 décembre.
  • Épreuves anticipées de 1re : entre le 10 et le 14 décembre inclus.
  • BTS : épreuves facultatives de langues vivantes du 8 au 12 octobre, épreuvesécrites du 5 au 9 novembre, épreuves orales et pratiques obligatoires du 12 au 30 novembre, épreuves obligatoires de langues vivantes du 19 au 23 novembre. Les résultats sont attendus le 20 décembre.

C.M. ©C.M.DNC/ AFP