Dengue : les premiers lâchers de moustiques Wolbachia prévus pour juin

Alors que l’épidémie de dengue progresse avec 327 cas dénombrés depuis septembre, les autorités poursuivent leur épandage dans les communes dans l’attente des premiers moustiques Wolbachia.

2 047 Calédoniens ont été infectés l’an dernier et deux personnes sont décédées des suites de la dengue. Depuis le 27 décembre, la Nouvelle-Calédonie est déclarée en situation d’épidémie de dengue, avec plus de 200 cas recensés en deux mois et 327 depuis le 1er septembre dernier, « principalement de la dengue de type 2 (99 % des cas typés) », précisent les services de la Direction des affaires sanitaires et sociales qui ajoutent que 30 hospitalisations ont été comptabilisées. Dans le détail, Nouméa, Dumbéa, Païta et le Mont-Dore sont les communes les plus affectées. À Nouméa, les quartiers sensibles sont Rivière-Salée, Vallée-des-Colons, Magenta et Logicoop.

À ce jour, c’est toujours par les épandages que les communes tentent de neutraliser l’épidémie. Les actions matinales de démoustication sont menées dans les rues ciblées, autour d’habitations qui ont été repérées par les services municipaux et sanitaires. Une méthode qui est controversée depuis de nombreuses années en raison des composants chimiques employés et qui devrait, d’ici quelques mois, laisser la place à une autre stratégie. En effet, la Dass, la Ville de Nouméa, l’Institut Pasteur et l’université de Monash, de Melbourne, ont signé en mars 2018 une convention sur la mise en œuvre à Nouméa du programme mondial de lutte contre les moustiques : le World Mosquito Programme (WMP). Il prévoit d’infecter la population des moustiques Aedes aegypti par la bactérie Wolbachia, qui empêche la transmission de la dengue.

Une transition attendue cette année

Si Nouméa est la première commune du territoire à rejoindre le WMP, il faut savoir que cette stratégie de lutte contre les arboviroses (dengue, chikungunya et Zika) est appliquée à grande échelle depuis huit ans en Australie et, plus récemment, au Brésil, en Colombie, Indonésie et au Vietnam, avec des résultats encourageants. Les observations sur le terrain ont en effet démontré une réduction significative de la transmission de la dengue dans les zones où Wolbachia a été introduite. Ne présentant pas de danger connu pour l’homme et les autres mammifères, Wolbachia se trouve naturellement dans environ 60 % des espèces d’insectes à travers le monde : papillons, libellules, certains moustiques… mais pas chez l’Aedes aegypti.

Les chercheurs et scientifiques du programme vont donc s’atteler, à partir du mois de juin, à introduire par étapes et dans une zone prédéfinie de Nouméa, un certain nombre d’Aedes aegypti porteurs de la bactérie au cœur des populations de moustiques sauvages. Une fois que les moustiques porteurs de Wolbachia auront été libérés, ils se reproduiront avec des moustiques sauvages qui transmettront Wolbachia à leur progéniture. Après quelques mois, la plupart des insectes porteront la bactérie et la propageront d’eux-mêmes. Ces moustiques auront une capacité réduite à transmettre des virus à la population, limitant ainsi le risque d’épidémies de dengue, Zika et chikungunya.

L’accord de la population

Parallèlement aux gestes scientifiques du WMP, il va falloir que les Calédoniens jouent le jeu pour mener à bien cette transition voulue par les autorités et la Ville de Nouméa. Il va falloir convaincre les populations de faire des lâchers d’insectes dans leur environnement, dans leur propre jardin. En ce sens, « ce projet de prévention, très ambitieux, va nécessiter une grande campagne de sensibilisation auprès de la population », avait prévenu Valentine Eurisouké, en charge de la santé au gouvernement, lors de la signature de la convention avec le WMP.


Le principe Wolbachia

Les scientifiques introduisent la bactérie dans les œufs de moustique par micro-injection. Les moustiques porteurs de la bactérie voient le jour et arrivés à maturité se reproduisent avec des femelles qui, à leur tour, sont porteuses et vont la transmettre à leurs descendants, ainsi de suite, jusqu’à éradication totale des arboviroses.


L’épidémie se poursuit

Les autorités sanitaires rappellent que la vigilance est de rigueur pour lutter contre la dengue. À cet e et, il est demandé à la population d’effectuer les gestes suivants :

  • détruire les gîtes larvaires en éliminant tout ce qui peut recueillir de l’eau de pluie, d’arrosage, de stockage (récipients, encombrants, gouttières…) à l’intérieur et aux abords des habitations,
  • se protéger des piqûres de moustique,
  • détruire les moustiques adultes,
  • éviter les déplacements et se protéger des piqûres en cas de maladie, pour ne pas propager le virus, consulter un médecin dès l’apparition des signes.

C.S