Ça bouge du côté des blocs

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Les informations se précipitent en ce début d’année concernant le monde des blocs opératoires. Deux thèmes sont récurrents : une volonté d’augmenter la chirurgie ambulatoire et celle de réduire les coups de bistouri. Le tournant est amorcé.

C’est une volonté nationale depuis les années 1990 et qui commence à faire son chemin en Nouvelle-Calédonie, surtout depuis l’installation du Médipôle et l’ouverture de la future clinique île Nou-Magnin. La chirurgie ambulatoire doit être optimisée et priorisée, soit une sortie du patient le jour même de son intervention chirurgicale, dans des objectifs de réduction des coûts. Car en principe, moins on garde les patients opérés en chambre, plus on fait d’économies.

Une vision qui n’est pas forcément partagée par tous les médecins qui estiment que le gain financier n’est pas absolu, vu que d’autres moyens, techniques et humains, sont à prendre en considération. « La plupart des rapports concluent à une rentabilité de la pratique ambulatoire par rapport à la pratique conventionnelle. Sur le papier, cela paraît évident : vous vous occupez de deux patients en une journée au lieu d’un seul et vous n’avez plus besoin de personnel la nuit, donc on a le sentiment que vous cassez les coûts, indiquait, par exemple dernièrement dans la presse spécialisée, le docteur Yann Gouëffic, du CHU de Nantes. Hélas « tout n’est pas rose dans l’analyse financière de l’ambulatoire. Il y a tout ce qui n’apparaît pas au premier regard : le coût pour la société de l’ambulance, par exemple, de l’aide à domicile. Ou le fait que l’ambulatoire crée, dans beaucoup de services, un besoin paradoxal de plus de personnel pour s’occuper des patients plus lourds qui sont plus nombreux dans les lits du service. » Si aucune étude sérieuse n’a été faite Métropole, ni ici d’ailleurs, sur le bien-fondé de privilégier la chirurgie ambulatoire, la volonté vient en tout cas par la voix de la ministre de la Santé : Agnès Buzyn a fixé pour objectif que sept patients sur dix soient opérés en ambulatoire d’ici cinq ans.

La fin du bistouri ?

Si l’on doit opérer plus vite, il faut, nul doute, compter sur des progrès techniques. Tous les chercheurs du globe s’efforcent donc de trouver des solutions pour opérer plus rapidement, voire éviter d’opérer ou du moins sans ouvrir. Le nombre d’appendicectomies, autrefois l’opération la plus courante, a été divisé par quatre en trente ans grâce aux progrès de l’imagerie médicale et de récents travaux annoncent qu’il serait possible de traiter les cas les plus simples avec la prise d’un antibiotique. Si réduire le nombre d’actes chirurgicaux apporte une bouffée d’oxygène aux finances hospitalières et à la santé publique par déduction, elle permettrait médicalement de diminuer aussi les risques d’infection et le temps de récupération des malades. Voire, dans certains cas, d’offrir une réponse thérapeutique à des interventions jugées trop risquées. Mais pour remplir ces objectifs, il faut innover par la recherche.

La recherche en solution

Afin de réduire les coups de bistouri, la matière grise est donc inévitablement appelée à la rescousse. Exemple : plusieurs équipes de recherche dans le monde, dont des Français, travaillent depuis des années sur la greffe de cellules cardiaques afin de réparer les tissus endommagés. Et récemment, une équipe de chercheurs canadiens vient de mettre au point une technique permettant de procéder à la greffe sans avoir à ouvrir la cage thoracique : une mini-compresse de la taille d’un timbre-poste est injectée avec une seringue sur la zone. Le bandage, porteur des cellules cardiaques réparatrices, vient alors se coller sur la zone à réparer. Des essais très concluants ont été effectués sur des rats et des cochons, reste à tester les effets sur l’homme.

Tout comme pour les AVC (accidents vasculaires cérébraux) : pour les cas les plus délicats, il faut opérer et les chances de s’en sortir sont maigres. Quand l’hématome est profond, il n’est pas accessible aux neurochirurgiens. La société Op2lysis est justement en train de développer un traitement qui permettrait de liquéfier l’hématome et de l’évacuer par un simple cathéter. Fini l’opération !

Autre exemple, si 65 % de la population dans le monde souffrent d’arthrose, aujourd’hui il n’existe que des traitements symptomatiques qui soulagent la douleur. « En cas de handicap sévère, on doit réaliser la pose d’une prothèse du genou ou de la hanche, explique Arnaud Bianchi, chercheur au CNRS. De nombreux progrès ont été réalisés dans ce domaine, mais ce sont souvent des interventions lourdes pour des organismes déjà fragilisés. » Une nouvelle voie de recherche consiste donc, depuis peu, à vouloir injecter dans les articulations, à l’intérieur même des cellules du cartilage, des substances capables de réparer la zone défectueuse. Plus d’opération, là aussi une molécule se chargerait de réparer l’arthrose métabolique.

On peut également ajouter les progrès en cancérologie. Non seulement dans les nouvelles formes de traitement, mais par une détection accrue. Chercheurs et spécialistes finalisent actuellement la création d’un dépistage par le sang d’un cancer chez un individu, avant même que la maladie se soit déclarée.

Si la fin du bistouri semble amorcée, les experts pensent qu’il faudra tout de même attendre encore au moins 30 à 40 ans pour que la majorité des opérations au bloc soit très considérablement réduite.


Info en bref : La lèpre,toujours présente

La 65e Journée mondiale de la lèpre s’est déroulée ce dimanche. Cette maladie, due à une mycobactérie appelée Mycobacterium leprae (ou bacille de Hansen), touche encore chaque année plus de 210 000 personnes dans le monde. En Nouvelle-Calédonie, elle a été diagnostiquée chez sept personnes en 2017, dont cinq enfants. En 2016, trois personnes avaient été identifiées et huit en 2015. La lèpre se transmet lors de contacts étroits avec un sujet infecté, par des gouttelettes d’origine buccale ou nasale. Au niveau des symptômes, des taches blanchâtres ou rougeâtres apparaissent alors sur le corps entre cinq et vingt ans après l’infection. On traite la lèpre en associant trois antibiotiques pris durant 6 à 24 mois.

 

C.S