Budget supplémentaire 2017 : Ce que cache Philippe Dunoyer… et que verront les élus du Congrès

Dernière scène du dernier acte de l’actuel gouvernement Germain : le budget supplémentaire 2017. En baisse, bien sûr, mais la conjoncture l’impose. En trompe-l’œil aussi : car le grand argentier, devenu député de Calédonie ensemble, laisse à son successeur les ponctions supplémentaires à faire sur le dos des Calédoniens… Les élus du Congrès savent aussi lire les chiffres !

Bel effort de présentation. – Une chose est claire : pour sa sortie du gouvernement, et devant le miroir de la « transparence », Philippe Dunoyer a fait de subtils efforts de maquillage, «comme une belle qui s’en va danser à Paris», dit la chanson. Scindé en trois budgets distincts, le BS 2017 s’établit logiquement en baisse, du fait de la conjoncture économique et des mauvaises rentrées fiscales. Normal, au lieu d’aider les entreprises en difficulté, la politique du gouvernement a consisté à les faire entrer, de gré ou de force, dans le presse-purée des prélèvements.

4,5 milliards de recettes en moins. – Côté chiffres, le budget de répartition (la part des provinces et des communes) se monte à 482 millions francs, soit une baisse de près de 4 % par rapport à l’année précédente, qui n’était déjà pas glorieuse. Le budget de reversement (taxes perçues pour le comptes des établissements publics) se monte à 6 milliards ; le budget propre de la Nouvelle-Calédonie, qui permet d’insuffler une politique si l’exécutif le souhaite, à 6 milliards aussi. Au total un BS de plus de 12 milliards, qui intègre « courageusement », nous dit Philippe Dunoyer, les 4,5 milliards de recettes qui manqueront en fin d’année. L’absence de ligne directrice s’en ressent, si ce n’est celle du « chien crevé au fil de l’eau » que l’on observe de loin. C’est peu en termes de prospective !

Peanuts. – Oui, les chiffres du BS sont peanuts en regard des années passées, c’est vrai. Mais il faut bien faire avec. Et, ils seraient suffisants « pour indiquer une direction », un espoir de sauvetage et ne pas se livrer à l’inutile saupoudrage, qui a perdu, un à un, tous les gouvernements socialistes de la France. C’est pourtant la piste qui a été choisie, avec notamment 100 millions de francs consacrés au plan Pulse, dont chacun mesure l’efficacité à mesure que le chômage augmente.

Quatre critères d’évaluation. – C’est pourquoi, les élus du Congrès qui examineront prochainement le budget supplémentaire de la Nouvelle-Calédonie, le feront en fonction de quatre marqueurs que voici… Et l’on pourra compter sur Grégoire Bernut, le vice-président du groupe Les Républicains calédoniens, pour veiller au grain :

1- L’emploi se dégrade encore. « L’analyse de l’emploi salarié du premier trimestre 2017 de l’Isee et celles de l’IEOM et de l’IDC-NC pour 2016, concluent toutes à de nouvelles pertes d’effectifs significatives qui n’ont pu être compensées que par les créations du secteur public. Au global, le chômage était en hausse de 2 % le trimestre dernier (le double, + 4 %, en province Sud) et de 10 % durant la précédente période », remarque Grégoire Bernut. L’affaire du Kea Trader et la non-réponse apportée par le gouvernement aux petites entreprises privées de livraison et contraintes au chômage technique se feront durement sentir dans les prochains chiffres…

2- La consommation des ménages décroche. – Selon l’IEOM, en 2016, les importations de biens de consommation non durables ont reculé de 4,6 %, celles d’articles d’habillement et de chaussures de 11,9 %, celles de produits alimentaires de 4 % tandis que les immatriculations de véhicules particuliers ont poursuivi leur recul avec une nouvelle baisse de 10,6 % pour atteindre un niveau historiquement bas. « Selon ces mêmes enquêtes, l’indicateur du climat des affaires stagne et reste inférieur de 10 points à sa moyenne de longue période. Alors que les prévisions d’investissement des entreprises se sont à nouveau contractées », note encore Grégoire Bernut.

3- Finances en « terre inconnue ». – Les finances publiques « entrent en terre inconnue avec le taux d’endettement de la Nouvelle-Calédonie qui pourrait atteindre le seuil critique de 90 % dès l’an prochain », dit Grégoire Bernut. Avec la caution accordée par le pays aux avions d’Aircalin, cet endettement pourrait être jugé « insoutenable » dès 2018. En effet, le tableau fiscal de la Nouvelle-Calédonie n’est guère édifiant depuis l’avènement du gouvernement Germain avec, précise Grégoire Bernut, « la chute libre de nos recettes fiscales : des rentrées fiscales qui s’élèvent à 6,7 milliards par rapport à 2015 avec la baisse de 6,7 % des impôts directs dont l’impôt sur les sociétés qui recule de 8,6 % et l’IRVM* de 20,8 % ; et celle des impôts indirects, qui passent de 120,7 milliards en 2015 à 116,2 milliards en 2016, soit un recul de 3,7 %. » Additionnés, ces chiffres témoignent de la voie sans issue dans laquelle Philippe Germain et Calédonie ensemble ont entraîné la Nouvelle- Calédonie.

4- La confiance perdue. – Depuis le 1er avril 2015, à aucun moment la politique du gouvernement démissionnaire n’a su gagner la confiance des milieux économiques. Le conflit des rouleurs et le stalinisme mis à imposer la loi antitrust ou la compétitivité ont définitivement braqué les entrepreneurs calédoniens contre l’équipe Germain. Pourtant, l’enjeu est évident : « Si l’on veut relancer la machine, il faut redonner confiance aux investisseurs », assurent Les Républicains calédoniens. Et pour y arriver des mesures fortes s’imposeraient. « Comme garantir une stabilité fiscale : plus de nouveaux impôts jusqu’à la fin de la mandature… Comme revenir rapidement à une TGC à deux taux… Comme supprimer la menace qui pèse sur les entreprises avec l’article 19 de la loi compétitivité et réviser la loi dite antitrust… ». Pour assainir l’économie, il le faudrait, mais le veut-on ?

En définitive, le BS 2017 sera certainement adopté par les voix des plateformistes, l’abstention d’indépendantistes, qui ont le regard fixé sur 2018. Mais ce budget n’offre aucune perspective de sortie de crise. Et c’est bien le plus décevant !

* Impôt sur le revenu des mobilières

 

M.Sp. ©MJS