A quand le sport sur ordonnance ?

Depuis le 1er mars, un décret autorise les médecins généralistes en métropole de prescrire du sport à leurs patients. Est-ce que la Nouvelle-Calédonie va suivre cette mesure ? Si tout le monde y est favorable, la question reste de savoir qui va payer.

Un décret de la loi Santé de janvier 2016 permet aux médecins généralistes en métropole de prescrire du sport à leurs patients à certaines conditions. Seuls les patients souffrant d’une affection longue durée, soit une trentaine de maladies listées par l’assurance maladie comme le VIH, les cancers, Parkinson, Alzheimer, la sclérose en plaques, le diabète ou encore la dépression, sont concernées, soit un total de 11 millions de personnes en France ou une sur cinq. Pour aider a cette prescription, la Direction générale de la santé met à disposition des médecins des ordonnances types. Mais là où le bât blesse, c’est que la Sécurité sociale ne prend pas en charge les prestations car ce ne sont pas des actes cotés. « Il faut ainsi des crédits fléchés par les collectivités territoriales, des financements privés, comme pour les réseaux de prise en charge de la toxicomanie », précisait Valérie Fourneyron, ex-ministre des Sports et l’initiatrice de cette mesure lancée en 2012. Résultat, il faudra se tourner vers la mairie concernée pour un éventuel remboursement, total ou partiel, dans le cas où celle-ci prend en charge les frais liés à l’activité physique du patient. C’est déjà le cas depuis cinq ans dans plusieurs villes pilotes comme Strasbourg, Toulouse ou Biarritz, sur la base du volontariat des médecins et grâce aux investissements des collectivités locales. Autre possibilité de remboursement potentiel : les mutuelles. Ainsi, la MAIF rembourse les frais de sport sur ordonnance jusqu’à 500 euros par personne. Tous les sports sont potentiellement concernés. Depuis cinq ans, les fédérations sportives travaillent sous l’impulsion de l’ancien ministre des Sports et médecin, Alain Calmat, à répertorier les bienfaits de telle ou telle discipline sur différentes pathologies.

Quel sport pour quelle pathologie ?

Le monde médical a lancé plusieurs pistes se basant sur des faits reconnus et des études menées depuis de nombreuses années. La boxe, l’escrime ou l’aviron ont été repérés comme étant d’une efficacité notable dans le traitement des suites opératoires du cancer du sein, le rugby à V a été quasiment inventé pour une population de seniors atteints d’Alzheimer et le cyclisme comme un bon remède au diabète. « Si vous demandez à une diabétique en surpoids d’aller à la piscine, il y a toutes les chances que ce soit un échec, indique Alain Calmat. En revanche, si elle se régale en jouant au basket, cela peut devenir une habitude de vie. »

Des informations données par les commissions médicales de chaque fédération vont être mises en fiches par les éditions Vidal, comme les médicaments, avec des entrées par sport et par pathologie. Le but du sport sur ordonnance n’est pas seulement la guérison de la pathologie concernée, mais surtout la bascule durable de tout un public vers une activité sportive suivie et régulière.

Et la Calédonie ?

Depuis de nombreuses années, on utilise sur le territoire le sport pour aider à soigner certaines pathologies. L’activité sportive est même conseillée par les médecins dans le traitement du diabète ou de certains cancers. Mais, tout comme en métropole par le passé, il n’existe aucune prescription et donc aucune prise en charge financière. « Le sport est uniquement et vivement conseillé par notre système de santé, on le voit par exemple avec les opérations menées par nos institutions comme la campagne de l’Agence sanitaire et sociale « Mange mieux, bouge plus ». À tous les niveaux, on est donc favorable à cette nouvelle disposition métropolitaine », explique Bruno Calandreau, le président de l’Ordre des médecins de Nouvelle-Calédonie. À ce titre, tous les acteurs santé du territoire s’étaient rencontrés l’année dernière avec des professionnels métropolitains pour débattre de la question : « La Cafat, l’Agence sanitaire et sociale, la Dass, les mutuelles et les médecins avaient tous donné un avis favorable à la prescription du sport par les généralistes. Mais comme en métropole, la question qui revenait sur la table était de savoir qui paierait. » Si la Cafat avait logiquement avoué son hésitation, seules les mutuelles, comme en métropole, avaient indiqué qu’elles pourraient envisager une prise en charge, mais dans quelle mesure ?

La balle est donc aujourd’hui dans le camp du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie qui, s’il souhaite suivre la métropole sur la question, devra décréter que les généralistes du territoire peuvent eux aussi prescrire du sport pour lutter contre certaines pathologies et surtout trouver une solution pour une prise en charge – totale ou partielle – soit auprès des mutuelles, soit auprès des collectivités. Une modification qui correspondrait pleinement à la volonté du plan de santé Do Kamo qui rappelle qu’il faut « faire de l’activité physique ».

C.S